J'ai été préposé aux bénéficiaires de 1987 à 1989 au Centre hospitalier de l'Université Laval. J'ai travaillé sur tous les départements, de l'urgence à la psychiatrie en passant par la gériatrie. J'ai rapidement obtenu un poste de nuit à l'époque parce que personne n'en voulait.
J'étais étudiant à la faculté de droit à l'époque et je n'avais pas un sou vaillant. C'est le moyen que j'avais trouvé pour payer et bientôt abandonner mes études.
De retour à Trois-Rivières, j'ai continué de travailler de nuit au Foyer Joseph-Denys, dans le secteur public encore une fois. J'y ai travaillé de 1990 à 1992.
J'habite aux côtés d'une Résidence pour aînés depuis quelques années et l'occasion s'est présentée d'effectuer un retour aux sources.
J'ai essentiellement travaillé dans le secteur communautaire au cours de ma vie. Je ne défilerai pas tout mon cv sous vos yeux mais disons que j'ai été organisateur communautaire, directeur de station de radio, rédacteur en chef d'un journal de rue, administrateur, en plus d'avoir effectué mille et un métiers en raison d'un marché de l'emploi plutôt fluctuant pour tout le monde par les temps qui concourent à nous faire courir.
On m'a proposé d'y travailler de nuit.
Et j'ai naïvement accepté la proposition.
Pour plusieurs raisons. La première étant ce besoin brûlant de contribuer à quelque chose dans la vie. Ce besoin de me sentir utile dans un monde cynique et froid. Ce besoin de mettre l'empathie au-dessus de toutes les valeurs humaines. Cette nécessité de faire du bien dans un monde où l'on se fait tant de mal.
Au fil des billets qui suivront sur ce blog, je vous entraînerai dans un monde que vous ne connaissez parfois que de très loin, parce que beaucoup de mes collègues de travail n'ont pas cette envie de tout raconter. Peut-être pour ne pas vous faire peur. Peut-être parce qu'elles et ils doivent se vider la tête et passer à autre chose.
Malheureusement pour tout ce bon monde, je m'improviserai leur voix.
Je m'inspirerai de Simone Weil qui n'a pas eu peur de se salir les mains pour entamer la rédaction de son livre intitulé La condition ouvrière. Les bureaucrates de la santé vont probablement passer au cash. Je jure que je vous dirai tout ce que vous ne voulez pas savoir sur les soins de santé. Tout. Je serai transparent comme de l'eau de roche. Un peu acide parfois. Jamais méchant.
Je garderai en mémoire mon héros imaginaire, Docteur Jivago, un poète qui sauvait des vies à une époque où elle ne valait rien.
J'aurai aussi une belle petite pensée pour Varlam Chalamov, auteur des Récits de la Kolyma, qui est devenu infirmier au goulag où il fût condamné de passer 25 ans en tant que prisonnier politique.
Bref, je vous emmènerai de l'autre côté du miroir, là où ce n'est pas toujours beau à voir, là où malgré tout se passe tous les jours et toutes les nuits des miracles. Des miracles qui reposent en grande partie sur les épaules de travailleurs sous-payés auxquels l'on exige la lune et auxquels sera promis une vieillesse sans fonds de retraite. Ils n'auront aucun moyen financier pour être hébergés dans les ressources où pourtant ils et elles travaillent en ce moment. Quelle ironie... Et comment voulez-vous que ces personnes qui prennent soin des malades n'échappent pas elles-mêmes à une forme de cynisme?
Je vous invite à me laisser vos commentaires et témoignages, via ce blog ou bien ma page Facebook.
Les récits d'un préposé seront aussi les récits de mes amis, camarades et collègues avec un peu de votre aide.
Il n'y aura pas que des drames.
Il y aura aussi des joies.
Tout sera dans le dosage pour que cela n'ait pas l'air sorti de nulle part.
Au plaisir de vous lire!
Gaétan Bouchard
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